=> Estonie, du 7 au 18 août 2023
129ème jour de voyage, j’ai quitté la Finlande pour entrer dans les Pays Baltes. C’est après un peu plus de 2 heures de ferry depuis Helsinki que j’ai rejoint Tallinn, la capitale de l’Estonie, le premier des 3 pays baltes que j’ai eu la chance de parcourir à vélo et de visiter. Je dois admettre que j’étais assez impatiente de changer d’environnement et je n’ai pas été déçue.
Ces trois pays qui, aux yeux des non initiés, forment un ensemble assez uniforme, ont finalement beaucoup plus de singularités que je ne l’imaginais, avec chacun une identité forte et une culture distincte. Les Estoniens, par exemple, parlent une langue de la famille des langues finno-ougriennes, c’est à dire une langue proche du finnois et, de par leur histoire, se sentent plus proches des finlandais que les lettons ou des lituaniens.
Tallinn : une magnifique ville médiévale
Dès mon arrivée dans le cœur de la vieille ville de Tallinn où se situait mon auberge, j’ai été émerveillée par la beauté de cette cité classée au patrimoine mondial de l’UNESCO. En effet, elle est considérée comme l’une des villes médiévales les mieux préservées d’Europe. Et même si une bonne partie de ses bâtiments ont été reconstruits après les ravages de la seconde guerre mondiale, cela n’enlève rien au charme de la cité, de ses rues pavées et de ses bâtiments colorés.
J’ai passé au total quatre jours dans la capitale estonienne, mais je n’ai consacré que deux jours pleins à sa visite, exclusivement sa vieille ville, les deux jours suivants étant essentiellement dédiés à la logistique pour préparer la suite de mon voyage et à mon blog.
J’ai ainsi passé ma première journée à déambuler dans les rues de Tallinn en suivant le parcours recommandé par le Lonely Planet. Il n’est pas vraiment judicieux de circuler à vélo dans la vieille ville, j’en ai fait l’expérience en arrivant et j’ai ensuite laissé mon vélo à l’auberge. En effet, les ruelles étroites et pavées, souvent en sens unique, au sein desquelles il faut slalomer parmi les très nombreux touristes, rendent l’expérience peu opportune. Par ailleurs, la taille de la ville se prête parfaitement à son exploration à pied.
J’ai donc pu admirer dans un premier temps les remparts médiévaux, les anciennes demeures de marchands hanséatiques toutes plus belles les unes que les autres ou encore la cathédrale orthodoxe. Puis je me suis régalée d’une saucisse estonienne dans un restaurant dégoté au cœur des remparts dont la devise était « a meal without a beer is called breakfast » (un repas sans bière s’appelle un petit-déjeuner ), j’ai obéi et commandé ma première bière estonienne évidemment !
Le lendemain, j’ai visité l’ancien Hôtel de Ville de Tallinn qui se trouve sur la grande place, la maison de la Grande guilde (confrérie de marchands à Tallinn au Moyen âge) dans laquelle se trouve une annexe musée d’histoire de l’Estonie, mais peut-être pas sa meilleure partie, ainsi que le musée de la ville de Tallinn. J’avoue n’avoir été emballée par aucune de ces trois visites, peut-être trop spécifiques.
Une expérience étonnante du sauna estonien
Je n’avais pas eu l’occasion de me rendre dans un sauna traditionnel en Finlande ni en Norvège. j’ai donc décidé de tenter l’expérience en Estonie, pays où la pratique du sauna est tout aussi importante.
En milieu d’après-midi, je me suis donc rendue au sauna Kalma. C’est le plus ancien sauna de la ville, situé un petit peu à l’extérieur des remparts. C’est un sauna non mixte avec deux entrées distinctes, une pour les femmes et l’autre pour les hommes. Le côté hommes est chauffé au feu de bois à l’ancienne, mais malheureusement le coté femmes est chauffé électriquement. L’expérience n’a rien à voir avec les spas modernes où l’on va pour se détendre. Ici, on vient pour se laver en profondeur. L’accueil était assez froid, personne ne parlait anglais pour m’orienter, alors je me suis débrouillée comme j’ai pu… J’ai quand même réussi à demander confirmation : oui je devais me mettre nue ! Passé le vestiaire, la première salle comporte des douches, des robinets et des bassines, et un grand bassin d’eau froide. La seconde pièce donne accès au sauna. Je me suis d’abord dirigée vers les douches et j’ai pris le temps d’observer, du coin de l’œil, les mamies qui se frottaient au gant de crin puis se rendaient au sauna. Une fois dans le sauna, j’ai pu constater ce que j’avais lu dans mon guide, elles se fouettaient avec des branches de bouleau pour faire circuler le sang. J’ai donc décidé de les imiter, passant l’étape du gant de crin que je n’avais pas de toute manière. Croyant que les branches de bouleau étaient « collectives » puisqu’elles étaient posées dans des bassines à l’extérieur du sauna, je m’en suis saisie et je les ai utilisées avant de comprendre qu’elles étaient personnelles, oups ! Les dames présentes ne cessaient d’ajouter de l’eau sur les pierres pour faire monter la température du sauna que je trouvais pourtant déjà très très chaud ! J’ai fait plusieurs aller-retours avec le bain froid qui n’était manifestement d’aucune utilité pour les autres femmes .
Les aspects logistiques du voyage
Les deux jours suivants ont été consacrés à la mise à jour de mon blog, au bricolage de mon vélo et à la définition de mon futur itinéraire. ces aspects prennent du temps et ne peuvent, la plupart du temps, pas être gérés sur la route ou en bivouac. II est donc important que je me pose un peu plus longtemps dans les villes, ce qui me permet aussi de me reposer.
Sur mon vélo, j’ai changé un câble de frein. Ce n’est pas grand chose, mais chaque fois que je parviens à régler seule mes petits soucis de vélo c’est une grande victoire pour moi qui ne savais, jusqu’à présent, que réparer une crevaison. C’est aussi rassurant de se dire que si besoin, au milieu de nulle part, je saurai gérer.
J’ai ensuite travaillé à la définition d’un projet d’itinéraire pour les mois suivants. Il devrait s’approcher de cela : Lettonie (Riga) ; Lituanie (Vilnius) ; Russie (Kaliningrad) ; Pologne (Gdansk, Varsovie, Cracovie) ; Slovaquie (Bratislava) ; Autriche (Vienne) ; Hongrie (Budapest) ; Roumanie (Timișoara) ; Serbie (Belgrade) ; Roumanie (Bucarest) ; Bulgarie (Sofia) ; Macédoine du Nord (Skopje) ; Grèce (Thessalonique, Athènes, Îles grecques) ; Turquie (Istanbul). Villes auxquelles il faudra évidemment ajouter de nombreux stops et détours sur la route que je n’ai pas encore identifiés.
Au moment où j’écris ces lignes, un mois après mon passage à Tallinn, je ne suis rendue qu’à Gdansk, et je mesure encore plus à quel point ce programme est ambitieux si je veux atteindre la Turquie avant qu’il ne fasse trop froid. Cependant, pour l’instant je refuse d’accélérer et de bâcler les visites des pays et villes que je parcours ou d’en contourner certaines. Je ne veux pas transformer ce voyage en course contre le temps. J’aviserai le moment voulu et je ferai alors les choix qui s’imposent.
Avant de quitter Tallinn, j’ai repris mon vélo pour vérifier que « tout roulait » et notamment que ça freinait correctement. Je suis allée me promener dans le parc Kadriorg pour admirer le splendide palais du même nom et jeter un œil au palais présidentiel.
Rouler en Estonie et sur ses îles, un vrai régal
La sortie de la ville de Tallinn s’est avérée être hyper compliquée en raison des travaux un peu partout dans la ville. Il est vrai que, dans les pays nordiques, il n’est pas possible de faire de travaux pendant l’hiver, donc ils se rattrapent l’été et travaillent souvent à des horaires très tardifs ou le week-end. Mais une fois sortie de la ville, la route s’est avérée très agréable. J’ai pris la direction plein ouest en direction de l’île d’Hiimumaa. J’ai roulé à travers des forêts de pins qui n’ont rien à envier aux forêts finlandaises ou suédoises, essentiellement sur des petites routes ou des pistes bien roulantes et très agréables car en dehors du trafic automobile.
L’Estonie, très à la pointe en matière de nouvelles technologies dispose d’une application smartphone très bien faite pour repérer les spots de bivouac aménagés (RMK). J’ai ainsi pu profiter toutes les nuits de ces sites dans des lieux isolés. Une nuit j’ai même pu profiter d’une petite cabane !
La météo étant favorable, j’ai également pu redécouvrir les couchers de soleil au bord de l’eau. Ça faisait longtemps que je n’en avais pas vu avec le soleil de minuit !
J’avais décidé de parcourir l’île d’Hiimumaa puis celle de Saaremaa. Chacune est reliée à la terre par un ferry et un ferry relie également les deux îles entres elles, mais celui-ci ne passe que deux fois par jour, le matin et le soir. J’ai donc élaboré mon itinéraire en tenant compte de ces contraintes horaires. Je n’aime pas trop avoir de telles contraintes car il m’est toujours difficile d’estimer le temps que je vais mettre à suivre l’itinéraire que j’ai programmé. Évidemment cela dépend de la distance à parcourir, mais également du dénivelé, du sens du vent, de ma forme, des pauses et des éventuelles visites que j’ai l’occasion de faire… alors par précaution je prévois toujours beaucoup de marge et j’arrive toujours très en avance. On ne se refait pas !
Île d’Hiimumaa
Sur l’île d’Hiimumaa, j’ai eu une journée au top : une météo parfaite, très peu de voitures, des types de routes et des paysages variés. Je ne me suis pas aventurée au nord de l’île mais me suis limitée au sud qui était recommandé par mon guide. J’ai été voir notamment Kassari au sud, une jolie petite église et un isthme étonnant.
En roulant vers la pointe de l’isthme j’ai croisé un allemand qui était en voyage à vélo depuis 6 semaines. Il roulait vers le nord avant de rejoindre l’Allemagne en bateau. Il s’est un peu lamenté sur son sort, m’expliquant qu’il avait des « jours avec » et des « jours sans » et se demandait comment je faisais pour rouler seule sur une aussi longue période. En prenant le temps d’y réfléchir, je me suis rendue compte que, pour ma part, je ne considérais pas vraiment avoir des « jours sans ». Évidemment certaines journées sont plus dures que d’autres, soit parce que la météo est mauvaise, soit parce que l’itinéraire est difficile ou peu intéressant, soit parce qu’on enchaine les petites contrariétés. Mais je ne me suis jamais couchée le soir en me disant que c’était une mauvaise journée ou en me demandant pourquoi je faisais ce voyage. Sauf peut-être le premier jour mais ça ne compte pas ! Je lui ai recommandé de s’inscrire sur le site warmshowers pour faire des rencontres avec des locaux et d’écouter des podcasts s’il trouve certaines journées un peu longues, mais je ne suis pas certaine qu’il renouvellera l’expérience.
Île de Saaremaa
J’ai de nouveau eu une très belle journée sur les petites routes et les pistes de l’île de Saaremaa le jour suivant. J’ai donc pris beaucoup de plaisir à vadrouiller entre églises, moulins et champs de blé. Même s’il m’a fallu parfois pousser le vélo, voire le porter après avoir déchargé toutes mes sacoches pour enjamber un arbre en travers de la piste. Ce sont les aléas de ce type de parcours !
J’ai fini ma journée par une rencontre sur le ferry avec deux Estoniens originaires de l’île, qui débutaient un voyage à vélo de quelques jours. Nous avions repéré le même spot de bivouac au bord de l’eau et nous nous y sommes donc rendus ensemble. Alors que je me faisais la réflexion que les Estoniens étaient aussi froids que les Norvégiens, ce couple est venu démentir mes observations. On a pas mal discuté tout en se préparant à dîner, ils avaient de nombreuses questions à me poser sur le voyage à vélo car ils envisagent également de faire un long voyage à vélo à l’avenir. Mais de ce fait, j’ai beaucoup répondu à leurs questions et eu peu l’occasion de les interroger sur l’Estonie.
Île de Kinhu
Après avoir pris le petit déjeuner avec le couple d’estoniens en voyage à vélo j’ai pris la route en direction d’une troisième île : Kinhu. J’avais de nouveau un horaire à respecter puisque le bateau partait à 17h30. Mais l’Estonie étant un pays très plat, il est facile d’y parcourir de longues distances quotidiennement et j’avais suffisamment de marge pour faire un détour de 10km pour aller déjeuner au bord de la mer.
La petite île de Kinhu, qui compte moins de 500 habitants, est classée au patrimoine mondial de l’UNESCO pour avoir conservé ses traditions ancestrales. Arrivée sur l’île, je l’ai traversé en 15 minutes pour rejoindre le camping que j’avais repéré. Elle est vraiment toute petite ! Initialement je pensais reprendre un bateau le lendemain à 12h30, mais après avoir vérifié les horaires, celui-ci ne partait qu’à 16h30, ça me laissait beaucoup de temps pour explorer un si petit territoire !
Le jour suivant, j’ai donc pris le temps de visiter le musée, de monter en haut du phare et d’explorer tous les recoins de l’île avant de me poser en terrasse pour déguster un excellent hareng grillé.
Je continuais à trouver les Estoniens particulièrement froids, notamment parce qu’ils ne répondaient jamais à mes signes de bonjour. Mais en sortant de l’épicerie, une petite mamie ne parlant pas anglais, m’a félicitée de voyager à vélo grâce à un pouce vers le haut, c’était sympa.
Mon guide touristique vantait les tenues traditionnelles des femmes de l’île. C’est un peu exagéré, je n’ai vu que celles des structures touristiques (musée, restaurant) porter la jupe traditionnelle. Même cette gentille mamie, qui devait bien avoir 90 ans, ne portait pas la tenue traditionnelle de l’île. Pour autant, je craignais que la journée ne soit longue, mais j’ai finalement trouvé très agréable de prendre mon temps, l’environnement s’y prêtait parfaitement.
Une fin d’itinéraire moins agréable
J’ai terminé mon itinéraire en Estonie en prenant la route vers le sud en direction de Riga en Lettonie. Malheureusement après avoir passé la cité balnéaire de Parnu, il n’y avait plus de petite route tranquille à travers la forêt, mon GPS ne me proposait que la route nationale. Après avoir roulé quelques kilomètres sur une voie rapide avec pas plus de 20 cm de bande roulante sur le côté droit de la ligne blanche, j’ai voulu tenter ma chance par les pistes forestières. Mais si mon GPS ne m’y envoyait pas c’est qu’il y avait une raison, je devrais le savoir maintenant. Après avoir poussé mon vélo pendant près de 4 km dans le sable, je me suis résolue à retourner sur cette route nationale pendant les deux jours suivants pour rejoindre Riga. Je m’y suis fait deux ou trois frayeurs avec des camions qui ne prennent vraiment pas beaucoup de marge. C’était un avant-gout de ce qui m’attendait en Lettonie et en Lituanie…