Une rapide traversée de la Lettonie à vélo qui m’a réservé une très belle surprise

=> du 19 au 23 août 2023

Je n’ai passé que 5 jours en Lettonie, dont 3 jours à Riga. Il faut dire que c’est un petit pays et que les routes y sont assez peu adaptées au vélo. J’ai donc choisi de ne pas faire de détour et de rouler plein sud, directement vers Riga puis vers la Lituanie. Mais la capitale lettonne, à elle seule, mérite largement le voyage. Et ma difficulté à trouver un lieu de bivouac après avoir quitté la ville m’a réservé une très belle surprise.  

Itinéraire réalisé en Lettonie – environ 230 km

Une entrée dans le pays moyennement agréable

Alors qu’il y avait eu des orages toute la nuit et que la météo s’annonçait mauvaise, je me suis réveillée sous un ciel bleu revigorant. Mais c’était plus ou moins la seule bonne nouvelle de la journée.  En effet, j’ai passé ma première journée en Lettonie à rouler, 106 km tout de même, quasiment exclusivement sur des routes nationales à deux voix avec beaucoup de trafic et la plupart du temps sans bande d’arrêt d’urgence pouvant faire office de bande cyclable. Les camions, comme les voitures, ne pouvant se déporter sur la voie d’en face en raison du trafic dense, doublent très près et à très grande vitesse. Dans ces situations, je suis tellement concentrée pour rouler aussi vite que possible, mais aussi et surtout pour ne faire aucun écart, que je ne regarde pas mon rétroviseur et chaque véhicule arrivant derrière moi me procure une dose de stress supplémentaire. Lorsqu’une voiture de sport de la voie d’en face a entamé un dépassement en se retrouvant sur ma file, j’ai eu tellement peur que je me suis immédiatement déportée sur le bas-côté où j’ai dû faire une pause pour reprendre mes esprits.

Passage de frontière entre l’Estonie et la Lettonie

J’ai bien tenté de suivre l’itinéraire de l’Eurovélo pour éviter cette nationale, mais je me suis alors retrouvée sur de la piste qui n’était pas vraiment praticable, roulant alternativement sur du sable et sur de la « tôle ondulée ». Ayant plus de 100km à parcourir dans la journée pour rejoindre Riga, je ne pouvais pas me permettre de rouler à moins de 10 km/h, vitesse maximale atteinte sur ce type de piste.

En fin de journée, la route avait été tellement éprouvante que les 15 derniers kilomètres m’ont semblé insurmontables. Tous les prétextes étaient bons pour faire une pause : pause snack, pause vérification de l’itinéraire sur le GPS, pause remplissage de la gourde… Lors de cette dernière, dans une station-service, je me suis offert une glace pour me donner du courage, ce qui a été très efficace.

Deuxième bonne nouvelle de la journée, mon auberge, en plein centre-ville de Riga, sera un lieu parfait pour me ressourcer et visiter la ville.

Vue sur la place centrale de Riga depuis la chambre de mon auberge

Riga : une magnifique capitale aux bâtiments Art nouveau

J’ai commencé ma visite de Riga par un tour de la ville des bâtiments du style Art nouveau dont la cité ne manque pas. Le clou du spectacle, la rue Alberta, qui concentre à elle seule une grande partie des plus beaux immeubles de la ville.

Immeubles de la rue Alberta, Riga

J’ai poursuivi ma visite en me promenant dans le dédale médiéval de Riga et en m’arrêtant ça et là pour admirer les bâtiments, visiter la Cathédrale et l’église Saint-Pierre dont le clocher donne accès à une vue magnifique sur la ville.

Vue sur les toits de Riga

Pour ma deuxième journée à Riga, j’ai profité d’une météo moins agréable pour me concentrer sur quelques-uns des nombreux musées de la ville. La Lettonie a, comme les deux autres Pays Baltes, une histoire compliquée et difficile, alternant entre l’occupation du pays par la Suède, la Russie et l’Allemagne. La ville qui a été partiellement démolie par les bombardements de la seconde guerre mondiale et qui a perdu une très grande partie de sa population, les juifs décimés par l’holocauste et les allemands appelés par le régime nazi, a ensuite dû faire face à l’occupation soviétique. Ce n’est donc qu’en 1991 que le pays a reconquit son indépendance et s’est tourné vers l’ouest et l’Union européenne qu’elle a intégré en 2004. Beaucoup de mes visites ont donc eu trait à cette histoire récente.  

Monument de la liberté sur la place de l’indépendance, Riga

J’ai commencé par visiter l’ancien immeuble du KGB, utilisé par les Russes pendant leur occupation du pays en 1940 puis après la seconde guerre mondiale. Les récits de ce qui s’y est passé durant cette occupation soviétique sont vraiment glaçants même il n’était malheureusement pas possible de visiter les cellules.

Ancien immeuble du KGB

J’ai également visité le musée du ghetto de Riga et de l’Holocauste Letton qui retrace malheureusement très bien les horreurs perpétrées par les nazis durant la guerre.

J’ai ensuite enchaîné sur le musée des barricades de 1991. Celui-ci explique l’histoire de la lutte pour l’indépendance face à l’union soviétique en Lituanie et Lettonie en 1991. Même si le musée est minuscule, installé dans un appartement du centre-ville, et que la muséographie était un peu artisanale, j’ai trouvé qu’il expliquait très bien le combat de ces peuples pour leur indépendance.

Pour prendre une pause au milieu de ces visites, j’ai été déjeuner au marché. Celui-ci prend place dans d’anciens hangars à dirigeables de la Seconde Guerre mondiale. J’ai eu l’impression de faire un bond dans le temps et de me retrouver en URSS, alors même qu’à quelques centaines de mètres on trouve un centre commercial dernier cri ! Les russophones représentent environ 30% de la population, la moins aisée. Ce sont eux qui tiennent la majorité des stands au marché où l’on n’entend parler que russe. J’y ai donc mangé des spécialités russes : des raviolis à la viande et des crêpes au jambon et au fromage qui étaient très bons.

En route pour le château de Rundāle

Dernière photo avant de quitter Riga devant le coq, emblème de la ville et la cathédrale en arrière plan

Après une troisième journée « off » à Riga – par off il faut comprendre gestion de la logistique du quotidien – , j’ai repris la route vers le sud en direction de Vilnius, en Lituanie. Tout comme pour quitter Tallinn, la sortie de la ville a été laborieuse, d’abord à cause des travaux, puis en raison de la cinquantaine de kilomètres sur de la route nationale, pas très agréable mais avec, cette fois, une bande d’arrêt d’urgence permettant de se sentir à peu près en sécurité. J’ai ensuite roulé une trentaine de kilomètres sur de la piste cahoteuse où je me suis fait courser à deux reprises par des chiens de ferme plutôt petits mais très agressifs. À choisir entre les deux je ne sais plus !  

Château de Rundāle vu depuis son parc

J’ai fini par arriver au château de Rundāle. Construit au 18ème siècle par le Duc de Courlande. Le bâtiment, d’architecture baroque, est une splendeur. Certains le surnomment  le Versailles de Lettonie et en effet, certaines des 138 pièces du château ne manquent pas d’excentricité. Les jardins à la française méritent aussi la visite.

Un accueil imprévu des plus chaleureux par Ilga

Après ma visite, j’ai repris la route vers le sud en quête d’un bivouac dont je pressentais qu’il serait difficile à trouver. En Lettonie, je n’ai pas connaissance de l’existence de lieux de bivouac aménagés comme en Estonie. Mais surtout, la partie du territoire que je traverse est essentiellement agricole et très plate. Il était donc difficile de trouver un endroit où je puisse me cacher un peu pour planter ma tente. Il n’y avait pas non plus de camping dans le coin. Au bout d’une heure de recherche infructueuse, alors que j’avais déjà une petite centaine de kilomètres dans les jambes, je me suis décidée à frapper à la porte des maisons sur ma route pour demander l’accès à un bout de jardin. Je ne suis pas très à l’aise avec la démarche mais il ne fallait pas que je tarde car il était déjà près de 19h et, en Lettonie comme dans les autres pays nordiques, les gens dînent tôt. Je ne voulais donc pas les déranger trop tard. A deux reprises j’ai voulu tenter ma chance mais j’ai fait demi-tour en raison de l’accueil canin qui me semblait peu amical, mais la troisième maison était la bonne.

J’ai été accueillie par Ilga qui a non seulement accepté que je plante ma tente dans son jardin, mais qui m’a surtout proposé un lit dans sa maison ! Elle parlait un anglais tout à fait correct et semblait ravie de m’accueillir. Comme si elle savait ce dont ont besoin les cyclovoyageurs en fin de journée, elle m’a immédiatement proposé une douche, une lessive, et m’a préparé à manger sans même me demander si j’avais faim, alors qu’elle avait déjà dîné.

La soirée a été très sympa. Ilga m’a parle de sa vie, de ses enfants qui sont partis vivre à Riga, des années qu’elles à passées à travailler au château de Rundāle avant de prendre sa retraite bien méritée. Elle m’a aussi beaucoup parlé de politique, de la Russie, de Vladimir Poutine et de la guerre en Ukraine. C’était très intéressant de constater à quel point les habitants des Pays Baltes se sentent concernés par le sujet. C’est cette nuit-là que Evgueni Prigojine est mort dans un accident d’avion. Sujet de conversation tout trouvé au petit déjeuner !

Depuis le début de mon voyage, je n’avais jusqu’alors planté ma tente qu’à deux reprises dans le jardin de locaux après avoir frappé à leur porte, en Suède et en Norvège. Alors qu’on pourrait croire que c’est plus facile que de chercher un lieu de bivouac, je trouve au contraire que c’est toujours délicat de demander. Pourtant quelle expérience merveilleuse quand on est accueillie aussi chaleureusement !

9 commentaires

  1. Merci Audrey de nous faire vivre ton voyage. J’avais suivi ton tour du monde il y a quelques années, et très heureux de suivre la suite. Bonne route et merci encore

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