=> du 7 septembre au 6 octobre 2023
Après quelques jours passés à Kaliningrad, à mon arrivée en Pologne, j’étais un peu tiraillée entre l’envie d’accélérer pour avancer plus vite vers le sud et l’envie de profiter pleinement de ce grand pays très riche culturellement. J’ai choisi la seconde option et j’ai eu la chance d’avoir une météo particulièrement clémente pour la période. Mon itinéraire m’a amenée à rouler environ 1 000 km sur le territoire polonais, majoritairement le long de la Vistule, afin rejoindre Cracovie depuis Gdansk, en passant notamment par Torún et Varsovie. Un trajet riche de visites historiques et culturelles pour mieux comprendre l’histoire de cette région, notamment celle récente de la seconde guerre mondiale. Un trajet également très agréable car j’ai aussi découvert un pays aux très nombreuses pistes cyclables et dont les automobilistes sont très respectueux des cyclistes.
Gdansk, une belle entrée en matière de l’architecture polonaise
Depuis Kaliningrad, il ne m’a fallu que 3 jours pour rejoindre Gdansk, , suivant un itinéraire très agréable, d’abord au cœur de la campagne polonaise, découvrant mon premier château de chevaliers teutoniques à Frombork, puis le long des plages de sable blanc bordant la mer Baltique.
En arrivant en centre-ville de Gdansk, j’ai d’abord admiré les magnifiques bâtiments colorés de la très touristique voie royale, avant de découvrir que toute la ville avait été détruite par les bombes durant la seconde guerre mondiale. Ainsi, l’intégralité de ces magnifiques immeubles a été reconstruite après-guerre suivant les plans originaux, en sélectionnant cependant, pourquoi s’en priver, uniquement les plus beaux. Il n’en reste pas moins que la ville valait largement le détour depuis Kaliningrad, et j’ai trouvé cette entrée en matière très intéressante.
Basée dans une auberge en centre-ville, j’ai évidemment profité de ce joyau architectural en déambulant à loisir dans le cœur de la cité qui ressemble donc, à peu de choses près, à ce qu’il était il y a 3 siècles. D’ailleurs les touristes ne s’y trompent pas et sont particulièrement nombreux.
La ville de Gdansk est également riche en musées. J’ai choisi de commencer par la visite du musée de la seconde guerre mondiale qui m’a apporté nombre de connaissances très intéressantes pour la suite de ma visite du Pays.
J’ai aussi, bien évidemment, visité le centre européen de la solidarité situé au cœur des anciens chantiers navals. Il regroupe un musée retraçant l’histoire des révoltes syndicales en Pologne menant à la création du syndicat Solidarnosc et à l’ascension au pouvoir de Lech Walesa, ainsi qu’un centre de recherche et une bibliothèque. J’ai trouvé la muséographie vraiment très bien faite rendant la visite passionnante.
C’est aussi à Gdansk qu’à l’occasion de ma visite de l’église Sainte-Marie, très jolie au demeurant, je suis montée en haut du clocher pour admirer la vue sur la ville, puis redescendue par un escalier de pierre en colimaçon un peu raide jusqu’à glisser et tomber en me cognant le dos sur l’arrête d’une marche. La chute a été brutale et douloureuse, à tel point que j’ai craint de m’être cassé une côte. Ce ne sera finalement pas le cas, mais j’en ai gardé des douleurs pendant de longues semaines.
La forteresse teutonique Malbork
Sur la route de Varsovie, j’ai décidé de faire un crochet par la ville de Malbork pour y découvrir son château chaudement recommandé par mes hôtes de Kaliningrad. En quittant Gdansk à vélo, bien sûr, je découvre qu’alors que mes côtes me font mal en marchant ou en dormant, ce n’est pas le cas lorsque je pédale, ce qui est une bonne nouvelle.
Le château de Malbork, siège des Grands Maîtres de l’Ordre des Chevaliers Teutoniques édifié au 13ème siècle, est devenu aujourd’hui la plus grande forteresse médiévale d’Europe grâce à ses trois châteaux édifiés successivement et imbriqués les uns dans les autres. Avec ses murs en brique rouge, il domine majestueusement la rive est de la Nogat, un affluent de la Vistule. Le château est aujourd’hui transformé en musée. Sa visite audioguidée permet de se projeter au cœur de la forteresse au fil des siècles.
Un arrêt sympathique chez Tomasz à Swiecie
Pour une fois, j’avais pris le temps de préparer à l’avance mon itinéraire et j’en avais donc profité pour envoyer quelques demandes d’hébergement via le site Warmshowers mais également le site couchsurfing pour multiplier mes chances de rencontrer des locaux. C’est ainsi que Tomasz m’a accueillie chez lui très chaleureusement à Swiecie, une petite ville entre Malbork et Torun après une longue journée de vélo.
Tomasz est un très grand voyageur, à vélo principalement, mais aussi à pied dernièrement. Il a voyagé partout en Europe, en Asie centrale, en Chine… J’ai écouté avec beaucoup d’intérêt le récit de son voyage à vélo de la Pologne à la Chine avec son visa chinois qui arrivait à expiration, mais aussi celui de sa traversée de la Patagonie à pied dont il revenait tout juste. Nous avons aussi parlé un peu politique. D’une manière générale, je n’aborde pas de sujet politique lorsque je suis accueillie chez des gens que je ne connais pas. Mais si ces derniers abordent le sujet, je les écoute toujours avec grand intérêt. A quelques semaines des élections législatives polonaises, j’étais en effet très curieuse de savoir comment un jeune homme cultivé et ouvert sur l’étranger abordait la chose. Je n’ai pas été surprise lorsqu’il m’a expliqué qu’il espérait vivement que le PIS ne sorte pas majoritaire de ce nouveau scrutin.
Découverte du pain d’épices de Torún
Le lendemain, arrivée à Torún, j’ai choisi de faire une pause d’une journée pour découvrir la vieille ville qui est une des rares villes polonaises à avoir échappé aux bombardements lors de la seconde guerre mondiale. Le centre-ville fortifié se parcourt aisément et assez rapidement à pied. Je me suis promenée au hasard des ruelles pavées, découvrant les églises, places et autres maisons de marchands remarquables. La ville a un cachet indéniable, mais j’ai trouvé qu’un certain nombre de bâtiments mériteraient un petit rafraîchissement. Cependant il ne serait pas raisonnable de comparer Torún avec les villes dont les bâtiments ont été reconstruits après-guerre.
Malheureusement j’ai choisi un lundi pour découvrir la ville et l’essentiel des musées était fermé. Je n’ai donc pas pu en savoir plus sur Nicolas Copernic, natif de Torún, mais j’ai appris à faire du pain d’épices. Appelé pierniczki en polonais, la spécialité locale n’a absolument rien à voir avec ce qu’on appelle couramment pain d’épices en France, il ressemble plus à un biscuit, de couleur claire et est bien plus épicé.
Rencontre avec Elzbieta et Philip à Włocławek
En quittant Torún, j’ai rejoint Włocławek, petite bourgade à priori sans grand intérêt, mais où Elzbieta m’attendait avec son fils Philip suite à une demande formulée sur le site Couchsurfing. Cette fois, c’est après une courte journée de vélo que j’ai rencontré mes hôtes du jour. Lorsque je suis arrivée vers 15h, soit environ une heure après ma pause pique-nique, j’ai été pour le moins surprise qu’on me propose de dîner, mais j’ai évidemment accepté. Elzbieta m’a alors servi une soupe de farine fermentée et une grosse saucisse, m’expliquant que c’était un plat typiquement polonais que je devais absolument découvrir.
Après ce dîner anticipé, nous avons beaucoup discuté tout en faisant un long tour dans la ville. Lorsque le sujet des élections a de nouveau été abordé et que mes hôtes du jour m’ont expliqué vouloir à tout prix faire tomber le PIS, j’ai trouvé que c’était de bon augure ! De retour chez mes hôtes du jour, nous avons dîné de nouveau, vers 19h, mais de manière un peu plus légère cette fois !
La Pologne, un pays très agréable pour voyager à vélo
Depuis Wloclaweck, j’ai rejoint Varsovie en 3 jours, en continuant à pédaler suivant un itinéraire très agréable le long de la Vistule. Dès mon arrivée en Pologne, j’ai été surprise par la qualité des pistes cyclables ainsi que par la conduite des automobilistes très respectueuse des cyclistes. Quel changement après Kaliningrad et la Lituanie !
La Pologne est dotée d’un réseau de pistes cyclables très dense, qui sont souvent totalement séparées du réseau routier, y compris le long de certaines routes de campagne très peu fréquentées. Et sur ces itinéraires balisés, on trouve très régulièrement des aménagements permettant de s’abriter pour se reposer, manger ou dormir.
Quant à la conduite très respectueuse des automobilistes polonais, celle-ci m’a amenée à me demander comment la situation pouvait être si différente d’un pays à l’autre : alors que la Norvège est un pur bonheur pour les cyclistes, la Finlande l’est beaucoup moins. De la même manière, alors que les routes Polonaises sont vraiment agréables, celles de Lituanie sont un enfer. Je suppose qu’il s’agit de campagne de sensibilisation.
Ce que j’ai regretté, en revanche, c’est que tout au long de mon itinéraire le long de la Vistule, on ne voit finalement que très peu le fleuve. Celui-ci est souvent caché par une immense digue de protection, et les pistes cyclables sont en contrebas et assez éloignées des rives.
Ce qui était également moins agréable, ce sont les pistes cyclables qui, comme dans les pays baltes, traversent les nombreuses forêts du pays. On pourrait croire, à priori, que ce sont des itinéraires bucoliques, mais lorsque celles-ci se transforment en pistes de sable, il devient techniquement impossible de pédaler et vraiment difficile de pousser le vélo. Lorsque ça arrive, il faut alors décider de continuer sans savoir sur quelle distance il faudra pousser, ou alors faire demi-tour. Lorsqu’il est possible de faire demi-tour sur quelques centaines de mètres seulement évidemment la question ne se pose pas longtemps. Mais lorsqu’il s’agit de revenir en arrière sur 2 ou 3 kilomètres… personnellement dans ce cas je mise sur le fait de continuer tout droit et régulièrement je regrette !
C’est ainsi que je me suis retrouvée, entre Malbork et Swecie, sur des pistes forestières d’abord correctes, puis se dégradant progressivement jusqu’à devenir totalement impraticables. Il m’a fallu 1h30 pour réussir à me sortir de ce traquenard. Par la suite, j’ai évité autant que possible les portions de forêt qui se trouvaient sur mon itinéraire, même si cela impliquait des détours !
Varsovie, une semaine de repos forcé
Tout juste arrivée à Varsovie, ma douleur costale s’est brusquement et fortement réveillée au cours de la nuit. J’ai passé la seconde partie de ma nuit à me demander pourquoi la douleur était subitement revenue au bout de 10 jours et à m’interroger sur la suite de mon voyage si ma côte était cassée. Au petit matin, la douleur étant toujours très vive, j’ai décidé de me rendre aux urgences de l’hôpital. L’accueil n’a pas été très chaleureux, mais j’ai été rassurée d’apprendre que rien n’était cassé. Il me fallait « juste » supporter la douleur et attendre que ça passe.
J’ai alors décidé de me louer un petit appartement confortable pour faire une semaine de pause. J’ai passé beaucoup de temps à prendre soin de moi et à me reposer, puis, après quatre journées de repos, la douleur s’atténuant progressivement, j’ai commencé à visiter la ville.
La vieille ville a beaucoup de charme, même si, comme beaucoup d’autres dans les Pays Baltes ou en Pologne, elle a été presque intégralement reconstruite après la guerre. J’ai déambulé au hasard des rues et des ruelles avant de me rendre du côté de la « nouvelle ville » pour monter en haut de l’énorme bâtiment soviétique qu’est le Palais de la Culture. Celui-ci a été « offert » par Staline aux Polonais qui l’appellent ironiquement le gâteau de mariage. À l’époque c’était le seul bâtiment haut de la ville, aujourd’hui il est entouré de nombreux buildings. J’ai également visité le musée sur l’histoire des juifs de Pologne. L’audio guide en français était très instructif, c’est une bonne introduction avant la visite d’Auschwitz.
De Varsovie à Cracovie : un dernier bivouac
Après une semaine de repos, j’ai repris la route en direction de Cracovie, toujours le long de la Vistule ! De nouveau mes côtes me font moins mal sur le vélo qu’en marchant, mais je me suis tout de même prévue des journées assez courtes pour me préserver, d’autant plus que le soleil se couchait déjà très tôt en septembre (la Pologne est sur le même fuseau horaire que la France bien que largement plus à l’est). Bivouaquer alors que la nuit tombe dès 19h devient compliqué : soit on éteint tout dès que la nuit tombe, mais à 19h c’est un peu tôt pour dormir ; soit on s’éclaire mais on n’est plus caché, ce qui ne me plaît que modérément.
J’avais cherché des hôtes sur mon itinéraire sur les sites Warmshower et Couchsurfing mais sans succès et il n’y avait pas non plus de camping dans les environs. Je n’avais donc pas d’autre choix que de continuer à bivouaquer. Pour ma première nuit après Varsovie, je me suis donc enfoncée dans des chemins à travers les champs et ai pu profiter d’une jolie nuit de pleine lune.
Avant de rejoindre ce lieu de bivouac, comme à mon habitude, j’ai demandé de l’eau au bord de la route. La personne a insisté fortement pour me donner une bouteille d’eau minérale, probablement car elle-même ne buvait pas l’eau du robinet et j’ai eu du mal à expliquer que je disposais d’un filtre qui me permet de boire celle-ci sans crainte. C’est ainsi que j’ai découvert qu’on pouvait faire cuire des pâtes avec de l’eau gazeuse !
Ce sera finalement mon dernier bivouac en Europe car le lendemain, faute de trouver un endroit adapté, j’ai demandé conseil dans la rue et une vieille dame m’a proposé son jardin. Et c’est à cette occasion que je me suis rendue compte que j’avais oublié l’ensemble de mes piquets de tente dans le champ où j’avais dormi la nuit précédente. J’ai eu de la chance car la météo était clémente et ma tente peut se monter sans être ancrée au sol, mais le lendemain la météo s’annonçait particulièrement mauvaise, j’ai donc terminé mon itinéraire en train pour dormir au sec et me mettre à la recherche de nouveaux piquets de tente à Cracovie.
Cracovie, une trop courte visite
J’ai beaucoup aimé la ville de Cracovie. J’ai commencé ma découverte de l’ancienne capitale polonaise par un tour guidé de la vieille ville arpentant d’abord le Rynek Główny, place du marché d’époque médiévale et sa halle aux draps. J’ai ensuite découvert avec amusement le trompettiste qui joue le hejnał toutes les heures depuis la plus haute tour de l’église Notre-Dame. C’était un signal d’alarme à l’époque médiévale, c’est devenu le symbole musical de la ville. En passant par le parc du Planty recouvrant les anciennes douves, nous nous sommes ensuite rendus sur la colline du Wawel pour y découvrir son château, sa cathédrale et le dragon de Cracovie, en bas de la colline au bord de la Vistule, qui crache le feu toutes les 15 minutes !
C’est aussi tout au long de la promenade que se sont multipliées les occasions d’évoquer le plus célèbre des habitants de Cracovie, Karol Wojtyła devenu le Pape Jean-Paul II : soit parce qu’est érigée une statue à son effigie, soit parce qu’il a fréquenté l’université, soit encore parce qu’il a officié dans la Cathédrale.
J’ai par la suite, bien évidemment, visité le château de Wawel ainsi que sa cathédrale. Dans les deux cas, les audioguides rendent les visites vraiment intéressantes, permettant de se projeter dans le temps pour mieux comprendre l’enchevêtrement de cet étonnant ensemble architectural surplombant la ville et la Vistule et son histoire.
Après la visite guidée passionnante du centre-ville de Cracovie, j’ai choisi de renouveler l’expérience pour visiter Kazimierez, le quartier juif historique de Cracovie et son ancien ghetto. Le guide était de nouveau très intéressant, mais j’ai regretté de faire cette visite à la veille de mon départ de Cracovie car je n’ai pas eu l’occasion de visiter de synagogue.
En périphérie de Cracovie, j’ai aussi visité la mine de sel de Wieliczka. Les galeries dans lesquelles on descend à plus de 100 mètres sous terre, sont sécurisées par des étais de bois. Mais la mine date du 13ème siècle, et seule une petite partie du labyrinthe souterrain de tunnels et de salles qui représente au total environ 300 km se visite. Des chapelles y ont été creusées, dans lesquelles se trouvent d’immenses et magnifiques sculptures de sel.
Je trouve qu’il est toujours difficile d’évaluer le temps nécessaire pour visiter une ville, parfois j’ai l’impression d’avoir vu ce que je voulais voir en deux jours, parfois quatre jours ne suffisent pas. Je serais volontiers restée une ou deux journées de plus à Cracovie car de nombreuses autres visites m’auraient intéressée. Mais j’avais déjà réservé ma visite d’Auschwitz et mon train pour Vienne et je ne pouvais malheureusement plus changer mon planning.
Auschwitz : une visite éprouvante
J’ai quitté Cracovie pour rejoindre, en une journée de vélo, la ville d’Oświęcim en polonais, malheureusement plus connue sous son nom Allemand d’Auschwitz.
Point final de mon séjour en Pologne, je tenais à visiter les camps de concentration et d’extermination d’Auschwitz de Birkenau. J’ai effectué une visite guidée avec un groupe d’une quinzaine de francophones. J’ai été surprise par le nombre important de visiteurs mais, d’une certaine manière, c’est une bonne chose qu’autant de gens s’intéressent à cette partie de l’Histoire. La visite est difficile car on prend vraiment la mesure des horreurs qui s’y sont déroulées. Le récit de la guide sur la vie dans les camps est d’une incroyable inhumanité. Le camp de Birkenau, construit parce qu’Auschwitz était trop petit, est immense. Malgré tout il n’était pas suffisamment grand pour répondre aux « besoins » des nazis. Les fours crématoires avaient un « rendement » de 40 000 corps par jour, mais comme ce n’était pas suffisant, les nazis ont fait creuser des fosses communes.
Après 3h30 de visite pour le moins éprouvante, j’ai repris la route vers Katowice d’où j’ai pris un train pour Vienne le lendemain. En effet, mes parents ayant prévu de venir me voir à Budapest, il me fallait accélérer le rythme pour les y rejoindre à temps.